12 septembre 2008
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_"Eugénie?
_Eugénie?!
Ne fermez pas les yeux, restez avec moi, parlez moi....!"
Une claque pour me tenir éveillée. Une deuxième.
Je voyais son visage posé sur le mien, elle était affolée et maldroite dans ses gestes.
Jusqu'à ce que SOS médecins arrive.
Je me souviens les espéces de fils un peu partout qui me parcouraient le corps.
Ces "Bip" incessants.
Les virages qui donnent la nausée.
Le manque de perspicacité, l'inconscience.
Les "Combien j'ai de doigts mademoiselle? Combien? Répondez!"
Je distinguais à peine le son de sa voix. Il avait l'air irrité et cela m'effrayait, j'avais peur de mal faire, alors je disais des chiffres au hasard. Jusqu'à ce que dépité, il remonte la couverture sur moi. Gelée. J'entendais tout, incapable de répondre ne serait-ce que par un signe.J'étais enfermée dans mon corps, cloitrée dans un silence que je ne pouvais briser.
On a voulu m'attacher au lit parceque j'arrachais toutes mes perfusions en hurlant. Et que je ne supportais pas cette blouse horrible que l'on m'a forcée à mettre. Alors je l'enlevais tout le temps...[Je lirai plus tard que je me baladais à moité nue dans les couloirs à 2h du matin,ma fierté en a pris un coup]. M'échapper était devenu mon but, mon objectif, ma destinée.
J'étais dans une drôle de chambre, tout était vitré et c'était vraiment...bizarre, l'impression d'être une bête de foire au milieu de toutes les allées et venues des blouses blanches.
Croyant qu'il fallait m'enfuir à tout prix j'ai entrepris d'établir un plan, mais au moment où je franchissais la porte de la chambre je suis tombée nez à nez avec mon psychiatre [oui, il gère aussi les urgences et il fallait que cette nuit là il travaille, forcément] et j'ai soudainement réalisé que j'étais à poil sous ma blouse, que j'avais l'air d'une dingue en cavale et que je ne savais même pas ce que je foutais là. J'ai rien trouvé d'autre que de me casser la gueule. On m'a amené un fauteuil et on m'a recouché pour la énième fois.
Le lendemain je me suis retrouvée au CIAC*, complétement à l'ouest, déboussolée.
J'ai essayé de me souvenir, d'analyser, mais rien. Rien n'a de sens, que dalle. J'allais bien, j'étais en forme, du moins moralement, j'avais la pêche et des projets, de l'ambition, pourquoi j'aurai pris tous ces cachetons?
J'attends avec impatience les analyses de sang, mais ils sont persuadés que j'ai pris toutes mes benzo d'un coup. J'avais fait des reserves un peu partout dans ma chambre, qui a été fouillée de fond en comble. Je sais qu'il m'en reste. Mais je n'ai jamais pensé à les prendre...Je ne sais même pas pourquoi je les ai caché. C'est juste que je ne veux pas être un légume, vu les quantités.
Ils m'ont dit ne pas me reconnaître, que je faisais peur, que j'étais agressive. Que ce n'était pas moi. Et je n'ai pas de souvenirs. C'est horrible.
On m'a dit que de se mettre dans un état comme ça pouvait être dû au manque d'alcool, à la prise de drogues dures ou à l'injection de médicaments. Personnellement...aucune de ces 3 explications ne me convient. Les drogues, ok, mais pas jusque là. L'alcool, non...je me suis calmée, même s'il ya des restes quant aux médicaments...je ne me souviens pas les avoir pris.
Le psychiatre des urgences m'a dit que la dernière fois qu'il avait vu un traitment semblable, c'était en prison.
La dernière fois que c'est arrivé j, je veux dire que j'ai explosé comme ça, je me suis battue avec ma mère.
J'ai peur.
J'ai peur de perdre la raison vous comprenez?
J'ai des trous de mémoire horrible, je suis chancelante, je ...
Depuis que je suis rentrée je ne fais que gober ces petits cachets que j'ai semé secrétement dans ma chambre. Me libérer. A tout prix.
*Le Centre Intersectoriel d'Accueil et de Crises (CIAC), est un centre permanent disposant de quelques lits, permettant des prises en charge intensives et de courte durée pour répondre à des situations d’urgence et de détresse.
Et moi je suis là actuellement:
Les Centres de Post-cure sont des unités de moyen séjour, destinées à assurer après la phase aiguë de la maladie, le prolongement des soins actifs ainsi que les traitements nécessaires à la réadaptation en vue d’un retour à une existence autonome.